
Vendredi 13: d’où vient la mauvaise réputation de cette date?
Certains l’entourent scrupuleusement dans leur agenda, d’autres la remarquent aussitôt, même s’ils ne prêtent aucune attention aux superstitions: le mythe du vendredi treize est partout. Mais comment cette date en est-elle venue à incarner le mauvais présage? Éclaircissons cette étrange réputation.
Même si elle ne revient qu’à intervalles irréguliers, une superstition bien ancrée dans notre culture resurgit régulièrement au fil du calendrier: une à trois fois par an, le treize du mois coïncide avec un vendredi. Les plus prudents préfèrent alors reporter des décisions importantes ou s’abstenir de sortir, tandis que d’autres, plus narquois, guettent avec amusement les signes du mauvais sort. Et puis il y a les curieux, qui se demandent simplement: mais pourquoi? Retour sur les éléments qui, au fil du temps, ont entaché la réputation du vendredi treize.
Comment le chiffre «13» est devenu un symbole de malchance
La peur du vendredi treize n’est réellement documentée que depuis le début du XXe siècle. Pourtant, les origines de cette superstition sont bien plus anciennes: l’aversion pour le vendredi et la méfiance envers le nombre «13» remontent à l’Antiquité. Commençons par le chiffre. Pourquoi le treize?
Depuis toujours, le douze est considéré comme un nombre porte-bonheur. Il a quelque chose de magique: dans plusieurs contes des frères Grimm, on retrouve des groupes de douze personnages jouant un rôle central: «Les Douze Apôtres», «Les Douze Frères», «Les Douze Valets paresseux» et «Les Douze Chasseurs». On ne trouve en revanche aucun conte mettant en scène dix, onze ou treize protagonistes. Si le douze incarne l’équilibre, le treize apparaît alors comme une rupture: un élément de trop qui dérange l’harmonie établie. Et comme l’être humain tend à opposer le bien au mal, le chiffre «13» a fini par hériter d’une réputation douteuse, s’imposant comme chiffre de mauvais augure.
Le treizième convive maléfique
Le Nouveau Testament a durablement assombri la réputation du chiffre 13, qui jouissait peut-être encore d’un certain crédit avant cet épisode: le dernier repas aurait pu rester un moment d’unité si Judas n’y avait pas pris part. Mais en rejoignant Jésus et les onze disciples, il porta leur nombre à treize – et le malheur suivit son cours. À défaut d’imputer à Judas de noires intentions, on peut toujours incriminer ces circonstances «numériquement funestes».
Bien avant que ne naisse le mythe du vendredi treize, la superstition interdisant de réunir treize convives à la même table était déjà profondément ancrée. Dans certains milieux huppés, les plus craintifs engageaient même, contre rémunération, un quatorzième convive professionnel, au cas où.
C’est dans ce contexte que fut fondé, en 1882 aux États-Unis, le «Thirteen Club»: une société de treize membres qui se réunissaient régulièrement autour d’une même table, afin de démontrer, par leur obstinée survie, l’absurdité de cette croyance. Le club choisissait systématiquement le treize du mois pour ses banquets, sans pour autant que ce soit nécessairement un vendredi. Certes, la réunion inaugurale eut bien lieu un vendredi 13 janvier 1882, mais rien n’indique qu’à cette époque, l’association du chiffre «13» et du vendredi constituait déjà une superstition distincte. Il est néanmoins plausible que les esprits superstitieux nourrissaient déjà, depuis longtemps, une méfiance redoublée à l’égard du vendredi treize.
La malédiction du vendredi
La Bible n’a rien fait pour redorer l’image du vendredi. Au contraire, elle enfonce le clou avec une précision douloureuse: c’est un vendredi que Jésus fut crucifié. Certes, on parle ici du Vendredi saint, et fort heureusement, il ne survient qu’une fois par an. Mais pour de nombreux chrétiens enclins à la superstition, le vendredi demeure un jour de méfiance.
Il convient toutefois de nuancer: toutes les confessions ne partagent pas cette crainte. Là où certain·e·s catholiques évitent de se marier un vendredi, certaines régions protestantes d’Allemagne cultivent la tradition inverse: on choisit délibérément ce jour pour les noces. Un pied de nez aux superstitions, dans la droite ligne de l’esprit réformateur.
Les origines de la superstition moderne
La peur du chiffre «13» et du vendredi avait déjà une longue histoire au début du XXe siècle, lorsque Thomas William Lawson, courtier et écrivain américain, se lança dans l’écriture d’un roman. Il y mettait en scène un krach boursier, une journée noire donc, et choisit pour cela une date hautement symbolique: le titre même de son ouvrage, publié en 1907, était «Friday, the Thirteenth».
L’association de cette date à la malchance semblait déjà suffisamment ancrée dans l’imaginaire collectif pour que les lectrices et lecteurs frémissent à l’idée du désastre, avant même d’avoir tourné la première page. C’est néanmoins Lawson qui, avec ce livre, a cristallisé un sentiment diffus en une superstition clairement identifiable, une croyance qui, depuis, s’est largement répandue à travers le monde.
Le Black Friday (historique) a-t-il eu lieu un vendredi treize?
Non. L’événement à l’origine de l’expression «Black Friday» (un effondrement du cours de l’or) s’est produit le vendredi 24 septembre 1869. Il arrive toutefois qu’on avance qu’un véritable krach, et non celui imaginé par Thomas William Lawson dans son roman, aurait alimenté la crainte du vendredi treize.
Il est vrai que les vendredis ont été, de façon notable, le théâtre de plusieurs effondrements boursiers majeurs. Cela dit, parmi les grands krachs de l’histoire, un seul s’est produit un vendredi treize: celui de la Bourse de Berlin, en mai 1927. Cet épisode survient vingt ans après la parution du roman de Lawson et onze ans après la sortie d’un film policier muet allemand intitulé, lui aussi, «Vendredi treize». Ce krach berlinois ne saurait donc être à l’origine de la superstition.
Y a-t-il vraiment de quoi s’inquiéter?
Des imprévus et des accidents peuvent survenir à tout moment. Si le calendrier affiche par hasard un vendredi treize, on a vite fait de le maudire. Mais les données statistiques offrent une perspective plus rassurante. Ou bien ces dernières suggèrent-elles au contraire que le vendredi treize pourrait être un jour particulièrement chanceux? Plusieurs compagnies d’assurance ainsi que l’ADAC (l’équivalent allemand de notre TCS) ont examiné leurs registres et aboutissent à une conclusion étonnante: les vendredis treize enregistrent en moyenne moins d’accidents et de sinistres que les autres vendredis.
Cela s’explique sans doute par le fait que les personnes superstitieuses redoublent de vigilance ce jour-là, voire ne quittent pas leur domicile. Pour autant, cela ne signifie pas que le vendredi treize soit exempt de tout incident. Le vendredi treize ne se distingue des autres vendredis que par sa réputation. En réalité, comparés aux autres jours de la semaine, les vendredis restent, de manière générale, plus propices aux incidents.
Autres cultures, autres superstitions
La superstition qui entoure le vendredi treize s’est solidement enracinée dans de nombreuses cultures, notamment dans les pays anglophones, germanophones et francophones ainsi qu’en Europe du Nord et de l’Est. Ailleurs dans le monde, ce n’est qu’un jour comme les autres. Cela dit, la plupart des sociétés entretiennent leurs propres croyances: jours réputés néfastes, chiffres de mauvais augure, rites superstitieux… Pour en savoir plus, découvre l’article «Tour du monde des superstitions: que redoute-t-on dans les autres pays?».
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