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Les disques sont de retour, et c’est tant mieux!

25.01.2023

Longtemps considéré comme un objet du passé, le disque connaît une renaissance impressionnante depuis quelques années. Récemment, j’ai moi-même contracté le virus du vinyle, alors même que ce support avait déjà quasiment disparu avant ma naissance. Dans cet article, je vais tenter de comprendre l’engouement que connaissent les disques, sans céder à la nostalgie ni voir la vie en rose.

L’ascension, la chute et une deuxième vie: une brève histoire du disque

Penchons-nous d’abord sur le parcours du disque et du disque longue durée (long play, LP): mis au point en 1930, il constitua une amélioration du disque gomme-laque de 1896 et offrit pour la première fois une durée de lecture de 25 minutes par face. Ce n’est toutefois que dans les années 1950 que ce format s’est vraiment imposé. Peu à peu, de plus en plus de ménages possédaient un tourne-disque. Pendant une trentaine d’années, le LP fut LE média utilisé pour écouter de la musique chez soi.

L’avènement de la cassette, en 1963, et surtout du disque compact, en 1981, scella la disparition temporaire du LP. Au cours des années 1980, le disque noir disparut presque complètement des rayons, les magasins de musique misant sur les CD. Leurs avantages étaient nombreux: un format plus compact, qui permettait d’écouter de la musique lors des déplacements (voitures, walkman, etc.), une capacité de stockage accrue et pas de changement de face au milieu de l’album. En outre, la lecture ne se faisait plus mécaniquement avec une aiguille, mais seulement par un laser, ce qui n’engendrait pas d’usure au fil des écoutes. Bientôt, les LP furent l’apanage des nostalgiques et des conservateurs.

Mais les ventes de CD atteignirent leur apogée au milieu des années 1990, puis commencèrent bientôt à chuter elles aussi. Internet prit le pouvoir sur les ventes musicales. Les natels avec accès à Internet (popularisés dès 2007 par l’iPhone) et les services de musique en streaming tels que Spotify (dès 2008) dérobèrent des parts de marché considérables aux CD.

Un phénix qui renaît de ses cendres

Et puis un phénomène singulier se produisit: malgré l’essor de la numérisation, les disques connurent un regain d’intérêt. À partir de 2007 environ, leurs ventes repartirent à la hausse, à un niveau modeste, certes, mais progressant inexorablement. Les musiciens vendaient de plus en plus leurs nouveaux albums en format vinyle et le marché enregistra une croissance de plus de 20% par année. Entre-temps, les LP ont même dépassé les CD, du moins aux États-Unis. En Suisse, les ventes de disques représentent environ 2% du marché de la musique (env. 5 millions de francs par année), tandis que les CD se trouvent toujours à environ 9%.

Toutes les photos de cet article © Competec

Malgré cette part de marché encore modeste, la demande est énorme dans notre pays. Elle est environ trois fois supérieure à l’offre. Les amateurs doivent parfois attendre presque une année pour obtenir de nouveaux albums! En automne 2022, une entreprise suisse a donc relancé la production de disques après dix-huit ans: Adon Production AG, à Neuenhof (Argovie). Depuis peu, il existe donc de nouveau des vinyles Made in Switzerland.

Pourquoi ce récent regain d’intérêt pour les disques?

On peut citer différentes raisons et caractéristiques; d’autres médias (CD, streaming, etc.) offrent aussi en partie ces avantages, mais seul le disque les regroupe toutes:

  • Lever le pied: c’est justement parce que toujours plus de pans de notre vie se passent en ligne aujourd’hui et que tout est disponible immédiatement que de nombreuses personnes aspirent à un peu de calme, dans une optique de sevrage numérique. Et quoi de mieux pour lever le pied que de s’asseoir avec une tasse de thé (ou un verre de vin) et d’écouter volontairement son album préféré, sans avoir son natel à portée de main? La musique en devient une activité à part entière plutôt qu’un bruit de fond, comme c’est généralement le cas aujourd’hui.
  • Pour le toucher: plus encore qu’avec les CD, écouter un disque est une expérience physique: on sort le vinyle de sa fourre en carton, on retire la pochette en papier, on ouvre le couvercle du tourne-disque, on pose le disque sur le plateau et on place délicatement l’aiguille. Généralement, on entend tout d’abord ce grésillement caractéristique pendant quelques secondes, avant que le premier morceau commence. Aucun autre média n’offre à ce point un rapport physique avec la musique.
  • Reconnaissance pour les musiciens: bien que la musique en streaming soit plus populaire que jamais, les artistes gagnent très peu d’argent ainsi. Sur Spotify, ils ne reçoivent en moyenne que 0,3 centime de dollar par écoute. Pour gagner 1000 dollars, il faut donc plus de 330 000 écoutes, ce que de nombreux artistes n’atteignent de loin pas. Par contre, lorsqu’on achète un album vinyle (ou un CD ou en version numérique), 10 à 25% du prix d’achat revient directement à l’artiste. Pour un prix de CHF 30.–, cela représente jusqu’à CHF 7.50. Pour arriver à la même somme, il faudrait écouter 2716 fois en streaming les morceaux de cet artiste! En achetant des albums, le soutien aux musiciens est beaucoup plus direct, et on a en prime un objet physique, comparable à un article de merchandising.

Les pochettes de disques ont sans conteste plus à offrir, …

Le disque et moi

Enfant des années 1990, j’ai grandi avec les CD (et les cassettes). Mes parents avaient certes leurs vieux LP et même un tourne-disque à la cave, mais ils ne les ont jamais sortis. Jusqu’à récemment, ce n’est que dans des films que j’avais vu des vinyles.

Malgré le plaisir que me procure la musique, pendant les 25 premières années de ma vie, il ne m’est jamais venu à l’esprit de m’asseoir et d’écouter un album du début à la fin sans faire trois autres choses en même temps. Pour moi, la musique était (et est encore) en premier lieu quelque chose qui m’accompagne en arrière-fond, que ce soit au travail, en voiture ou à la maison.

Pourtant, d’une certaine manière, j’étais depuis longtemps attiré par le vinyle: le format analogue, sa simplicité, son style. Laisser pour une fois l’ordinateur éteint et profiter de la musique. «Ça arrivera un jour», j’en étais sûr.

Et ce jour est arrivé l’été passé. Je devais intervenir comme DJ lors d’un événement d’entreprise à Frauenfeld et j’étais beaucoup trop en avance. Pour tuer le temps jusqu’au début de la fête, je flânais dans le quartier quand je me suis soudain retrouvé devant un magasin de disques. Dix minutes plus tard, j’étais de nouveau devant l’entrée, deux vinyles à la main et un grand sourire sur le visage.

Cet achat n’était en rien réfléchi: je n’avais ni tourne-disque ni la place pour en installer un dans mon petit appartement. Mais je m’étais engagé sur ce chemin, alors il fallait trouver une solution.

Tout a commencé avec ces deux disques.

Le tourne-disque prend ses quartiers

Depuis longtemps, je voulais remplacer mon vieux buffet, et ça tombait bien. Une incursion dans les brocantes de la région me permit de découvrir un monstre, qui, grâce à ses deux étages, offrait suffisamment de place pour accueillir tous mes objets ainsi que le tourne-disque que j’avais en tête.

Le tourne-disque Lenco L 75.

Le couac suivant se manifeste lorsque je veux brancher le tourne-disque à mon récepteur audio: mon ampli n’a pas d’entrée phono. J’étais pourtant certain que c’était le cas. Cette fois, j’ai trouvé mon bonheur sur BRACK.CH avec un simple préamplificateur phono, à mettre entre le tourne-disque et le récepteur.

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La question de la préamplification

Contrairement à la plupart des autres sources audio, comme les ordinateurs, les lecteurs CD et les téléviseurs, les tourne-disques émettent un signal extrêmement faible, d’une tension environ cent fois inférieure. De nombreux récepteurs audio ne sont pas conçus pour cela; ils «attendent» un signal de puissance normale. Lorsqu’on branche un tourne-disque, le son est donc très faible, même quand on monte le volume.

De plus, la musique est déformée sur vinyle: les basses sont presque absentes, tandis que les aigus sont suramplifiés. Sans vouloir trop entrer dans les détails techniques, cela est dû aux dimensions (trop petites) du disque. Le support devrait être nettement plus grand pour pouvoir contenir les basses fréquences (= longues ondes sonores), ce qui ne serait tout bonnement pas pratique.

Un préamplificateur/égaliseur est nécessaire pour corriger ces deux problèmes. Cet appareil renforce le signal audio du tourne-disque d’environ 40 dB et l’égalise pour que le rapport entre basses et aigus soit rendu correctement. Ce système est intégré à certains récepteurs audio et tourne-disques. Si ce n’est pas le cas de votre matériel, il vous faut un appareil séparé, qu’on appelle «préamplificateur phono». Raccordez le tourne-disque à l’entrée audio du préamplificateur et la sortie audio à votre récepteur.

Attention: si votre récepteur audio possède une entrée où il est marqué «phono», il ne faut y brancher rien d’autre qu’un tourne-disque. Sans quoi, l’amplification extrême qu’effectue cette entrée pourrait endommager vos haut-parleurs (et vos oreilles).

Prochaine étape: acheter des disques. Bien sûr, je pourrais en commander sur Internet, mais je passerais alors à côté d’une expérience essentielle: fouiller dans un magasin de disques. Aujourd’hui, à une époque où quelques clics suffisent pour se faire livrer presque tout sur le palier de sa porte (ce que je fais aussi), faire ses achats dans un magasin physique comporte un attrait particulier.

J’ai donc cherché la boutique la plus proche pour me constituer une collection de base: un vrai bonheur, je vous l’assure! Des milliers de vinyles, neufs ou de deuxième main, empilés jusque sous le toit, de tous les genres imaginables. Un propriétaire/vendeur fou de musique, qui connaît probablement tous les groupes ayant sorti un album dans les années 1980. Et, dans cette boutique, une odeur indescriptible. Faire ses achats en ligne, ça ne fait de loin pas le poids.

Un voyage dans le temps dans mon appartement

Le grand moment est enfin arrivé: mon natel et mon ordinateur ont été bannis de la pièce et, pour la première fois de ma vie, j’ai placé l’aiguille du tourne-disque sur le vinyle.

Que dire?

Tout ce «parcours», depuis le choix du disque jusqu’à ce que les premières notes soient émises, ressemble à un rituel par lequel on invoque la musique depuis les profondeurs du passé. C’est une autre manière d’écouter de la musique que ce à quoi on est habitué aujourd’hui, hors du temps, mais d’une certaine façon familière. On ne s’expose pas à la musique, mais on l’écoute activement, on est attentif aux différents instruments, au chant et à l’harmonie entre tous les éléments.

Cette façon d’écouter de la musique, je dois dire que je la connaissais déjà. Une fois par semaine environ, je m’accorde quelques verres de whisky en écoutant de la musique. Jusqu’à présent, j’écoutais les morceaux depuis mon ordinateur via la chaîne stéréo. Le tourne-disque a désormais repris ce rôle. Et j’ai été surpris de voir à quel point lâcher mon ordinateur m’a détendu, alors que je ne l’avais jamais considéré comme un appareil dérangeant. Nous utilisons tant ces machines au quotidien que c'est un changement bienvenu de les laisser éteintes de temps en temps.

Un album qui n’a pas besoin d’être présenté, raison pour laquelle rien n’y est inscrit.

Pour ce qui est de la qualité audio, je n’ai pas mon mot à dire: je ne me distingue pas par mes compétences acoustiques. C’est clair, d’un point de vue technique, le disque est inférieur à la piste audio numérique (non comprimée), comme celle d’un CD. Que ce soit pour la réponse en fréquence, la dynamique (différence entre les sons les plus forts et les plus faibles), la séparation des canaux ou d’autres paramètres encore, le disque ne rend pas la musique avec la même fidélité à l’enregistrement original que le CD ou le streaming haute résolution. Mais, pour moi, ce sont justement ces petites imperfections qui constituent l’attrait du vinyle. Comme ce grésillement au début du disque et entre les morceaux.

Je l’ignorais auparavant: comme l’aiguille oscille dans les fréquences musicales, elle rend elle-même le bruit de l’enregistrement. C’est-à-dire que si on se place tout près du tourne-disque, on entend faiblement la musique directement depuis l’aiguille. Malheureusement, le son n’était pas assez fort pour ma caméra et je n’ai pas pu l’enregistrer.

Et l’écoute n’est pas le seul élément qui constitue l’expérience. Le choix des disques de la collection revêt lui aussi un caractère important. Comme il ne suffit pas de peser sur une touche pour passer au titre suivant ou changer de genre, il faut bien réfléchir à ce qu’on souhaite écouter. Je regarde mes albums et j’opère un choix délibéré, plutôt que de simplement appuyer sur «Play» et laisser l’ordinateur faire le travail.

Le vinyle, est-ce pour vous?

Nous voilà arrivés à la question cruciale. Disons-le comme ça:

Si

  • vous vous intéressez un tant soit peu à la musique,
  • vous voulez de temps en temps profiter d’un moment de détente,
  • vous souhaitez soutenir (davantage) vos artistes préférés,
  • vous avez de la place ou êtes prêt·e à en faire pour un tourne-disque,

je ne peux que vous recommander de donner une chance aux disques.

Tourne-disques chez BRACK.CH

Informations complémentaires:

Dominik Perrenoud

Rédacteur

Let the Beat Hit ’em ! En tant que DJ passionné par les mariages, je m’intéresse à tout ce qui fait écho à la musique. Dans ma vie privée aussi, j’écoute de la musique pratiquement en permanence, si bien que plusieurs haut-parleurs traînent dans l’appartement – du plus petit au plus grand. En outre, j’apprécie les bons films et les jeux sur mon home cinéma, je savoure un bon whisky (avec la musique de fond appropriée, bien sûr) et je fais des tours dans ma voiture décapotable de 20 ans à travers la Forêt-Noire.

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