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Comment YouTube a conquis la scène mondiale

01.07.2025

En 2005, Internet est méconnaissable par rapport à ce qu’il est devenu aujourd’hui. On n’y trouve ni reels ni shorts; TikTok n’existe pas, et, surtout, partager des vidéos représente un défi considérable. De fait, les utilisateur·rice·s qui souhaitent uploader de tels fichiers doivent se frayer un chemin à travers la jungle des formats, des lecteurs et autres termes techniques. Bref, tout est très, voire trop, compliqué. C’est alors que trois jeunes hommes ambitieux lancent un concept dont l’échec initial va servir de tremplin à un des plus grands succès de l’histoire du Web.

Les rencontres vidéo: un faux départ

En 2005, Steve Chen, Chad Hurley et Jawed Karim ambitionnent de donner un visage plus personnel aux rencontres virtuelles. Pas avec des photos et des questionnaires, mais par le biais de courtes vidéos où les gens peuvent se présenter. L’idée est audacieuse, mais trop avant-gardiste. Car en ce temps-là, s’asseoir devant une caméra, enregistrer un clip et le mettre en ligne pour impressionner des dates potentiels n’est pas encore entré dans les mœurs. De fait, la plateforme fait un bide et le projet est rangé dans les tiroirs.

Mais quelque chose de décisif s’est produit, car si échec il y a eu, c’est bien le concept qui est en cause et pas la technique. Les trois pionniers ont mis en évidence un élément essentiel: jusque là, Internet n’offrait pas de solution permettant d’uploader facilement des vidéos.

De la plateforme anonyme au portail universel

Chen, Hurley et Karim remettent l’ouvrage sur le métier. YouTube ne sera plus un vecteur d’autopromotion, mais une plateforme ouverte à tous les contenus: clips d’animaux, de mésaventures, d’expérimentations en tout genre, etc. Tout le monde doit pouvoir publier ses vidéos, sans obstacle technique, sans gatekeeper et sans besoin d’explications. Le dating devient de l’histoire ancienne, les mots clés étant désormais «démocratisation» et «visibilité». Et surtout, sur YouTube, les critères de qualité et d’importance passent au second plan; les séquences les plus diverses peuvent donc y trouver une place.

Un éléphant qui fait des émules

Quelques semaines seulement après ce changement de paradigme, une première vidéo est mise en ligne. Elle s’intitulait «Me at the zoo» et montre Karim devant l’enclos des éléphants du zoo de San Diego, expliquant sans grande originalité que ces animaux ont des trompes plutôt longues. La séquence ne dure que 19 secondes, elle est peu spectaculaire, sans musique, sans montage, et pourtant tout ça est complètement nouveau. Pour la première fois, quelqu’un a publié une vidéo réalisée en solo, sans connaissances préalables en matière de programmation, sans devoir éditer ou soumettre son œuvre à une quelconque autorité, et sans que personne ne décide si elle est suffisamment importante pour être dévoilée sur le Net. Le clip est là, prêt à être visionné par toutes celles et tous ceux qui disposent du lien d’accès. Et c’est justement cette simplicité qui rend le moment si spécial. Il ne s’agit plus de savoir si le contenu présente un intérêt sur le plan de la qualité ou de la pertinence; son existence se suffit à elle-même.

YouTube et les autres plateformes

Pour être tout à fait précis, YouTube n’a pas été le premier site à permettre le partage de vidéos sur Internet, il a toutefois été le premier à le faire avec des modalités si simples et si avantageuses.

D’autres plateformes avaient également reconnu très tôt le potentiel de cette activité, mais avec des approches très différentes, limitant leur accessibilité.

  • Crée en 2004, Vimeo a misé dès le début sur la qualité plutôt que sur la masse. Cette plateforme est par conséquent très appréciée des cinéastes qui souhaitent présenter leurs projets en haute résolution par le biais d’une mise en scène attrayante. A contrario, l’orientation artistique de Vimeo le rend peu compatible avec les contenus spontanés.
  • MySpace offre également la possibilité d’uploader des vidéos. Le réseau social le plus fréquenté au début des années 2000 est cependant axé sur la musique et l’autopromotion; peu convivial et surchargé durant son âge d’or, il n’a jamais été un outil idéal pour déposer des clips.
  • DTube a quant à lui misé sur la technologie blockchain, la décentralisation et la protection des données, une approche passionnante pour les technophiles, mais trop complexe et trop peu accessible pour un public de masse.

Facile à utiliser, ouvert et ne nécessitant aucune explication, YouTube a en revanche touché une corde sensible, car alors que ses concurrents passaient leur temps à éditer ou réglementer des contenus, il a choisi de relâcher la bride. C’était d’ailleurs là que résidait sa plus grande force: aucune recommandation n’était émise sur ce qu’il fallait montrer ou visionner; la scène était tout entière aux mains des utilisateur·rice·s.

Google entre dans la danse

En 2006, Google prend conscience du potentiel de la plateforme au logo rouge et blanc et en devient propriétaire pour 1,65 milliard de dollars, une somme astronomique à l’époque pour une start-up qui ne fait quasiment pas de bénéfices. Mais pour YouTube, c’est une aubaine puisqu’il va pouvoir profiter de la puissance des serveurs, de la logique de recherche et du capital de son acquéreur. Son essor est d’ailleurs spectaculaire... On n’y héberge plus seulement des vidéos personnelles, mais de la musique, des opinions, de la connaissance, du divertissement, de la politique, de la comédie, des drames, etc. Chaque minute, des centaines d’heures de nouveau matériel sont téléversées. Et le public, curieux, inquisiteur, accro, se prend au jeu...

Un miroir d’hier et d’aujourd’hui

Moteur de recherche, télévision, salle de classe, scène de spectacle, lieu de thérapie et plateforme d’opinion: aujourd’hui, YouTube est omniprésent. On y trouve des chaînes défiant les États et d’autres expliquant les secrets des œufs pochés. Un vrai condensé d’humanité!

Le plus impressionnant dans tout ça, c’est que YouTube n’a jamais été conçu pour un tel succès. 

Du vide à la scène mondiale

YouTube était un plan B, succédant à un concept qui n’a pas décollé, et c’est peut-être ce qui a été sa plus grande chance. Car au lieu de s’accrocher à leur idée de base, ses créateurs ont généreusement ouvert les portes à tous les types de contenus passant par la tête des internautes.

C’est cette ouverture d’esprit qui a fait la renommée de YouTube; pas une stratégie, mais le courage de penser différemment. Certes, le succès n’a pas été immédiat, mais vu l’incroyable popularité du portail, le jeu en valait la chandelle.

Les plus grandes réussites sont-elles engendrées par des échecs? L’histoire de YouTube serait un exemple parfait de ce constat.

Source de la photo de couverture: Adobe Stock | 711998271 

Selin Emek

Marketing Manager Editorial Content

Passionnée d’activités créatives, de voyages et de photographie, toujours motivée à élargir mes connaissances, je suis avide de découvertes. C’est quand je peux donner libre cours à ma créativité que je me sens le mieux. Lorsque je ne suis pas en train d’explorer le monde, d’immortaliser des moments particuliers ou de nourrir ma curiosité, j’adore profiter de la nature, me détendre dans des cafés chaleureux ou laisser mon côté artistique s’exprimer en peignant ma prochaine œuvre à l’acrylique.

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